Le vendredi 29 septembre

Le jeudi 21 septembre, le ministre du travail, Olivier Dussopt enterrait, au moins pour 2024, le principe du reste à charge pour le CPF. Pour rappel, le principe de ce reste à charge a bien été voté il y a un an par les députés, mais son application était suspendue à un décret en Conseil d’Etat qui devait en préciser les contours exacts mais qui n’a jamais été pris.

Avec l’annonce du ministre, on sait désormais que la publication éventuelle d’un tel décret ne modifiera pas la donne au mieux avant l’année 2025. Les raisons invoquées sont notamment la maîtrise cette année de dépenses au titre du CPF relevée par la Caisse des Dépôts et Consignations, qui prévoit environ 400 millions d’euros de dépenses de moins que les prévisions initiales pour le CPF. Ce ralentissement aurait pour partie son explication dans les mesures de contrôle des fraudes et un assainissement du marché qui tend vers une stabilisation des pratiques.

Le ministre souligne également que le CPF répond bien à sa vocation d’aide à la professionnalisation de ses utilisateurs. Certains journaux spécialisés, reprenant une étude de la DARES de février 2023, se réjouissent d’un chiffre de moins de 17 % de formations qui ne répondraient pas à cet objectif (ce qui est tout de même non négligeable, soit dit en passant).

Cette conjoncture permet au Gouvernement d’éviter une confrontation avec nombre d’acteurs du monde de la formation qui ont vertement critiqué le principe du reste à charge. Tout va donc pour le mieux dans le meilleurs des mondes de la formation en France !

Quelques questions néanmoins :

  • les organismes de formation sont dans leur rôle lorsqu’ils demande de supprimer un frein qui pourrait entraver leur développement. Ils évoquent les besoins d’accès à tous (le reste à charge n’aurait en tout état de cause pas impacté les chômeurs) et l’importance de la professionnalisation des salariés. Sont-ils pour autant très honnêtes et impartiaux sur ce point ?
  • les 17% de formations non directement liées à l’employabilité ne comprennent pas par exemple le financement du permis de conduire. Certes, le permis de conduire est souvent utile dans le cadre professionnel, mais est-ce vraiment aux entreprises (qui sont les financeurs du CPF, via la CUFP, rappelons-le) qu’ils revient de financer le permis de conduire des jeunes français ?
  • le « zéro reste à charge » fait passer dans les esprit un message de gratuité de la formation. Cela a un effet doublement pervers. D’une part, laisser penser que ce qui ne me coûte rien ne coûte rien, ce qui est complètement faux car cela a un coût non négligeable pour la société, au travers de ses entreprises notamment. Et d’autre part, si cela ne me coûte rien, cela n’a finalement pas de vrai valeur. D’où un risque réel de démotivation des stagiaires et de déconsidération de la formation professionnelle dans l’esprit des français.

Cette « bonne nouvelle » saluée par la plupart des professionnels du secteur de la formation n’est peut-être finalement qu’une victoire à la Pyrrhus qui conforte la plupart des acteurs dans un système d’assistanat dont la France semble championne mais que nombre de ses partenaires lui reprochent de plus en plus ouvertement. Et il n’est pas sûr que le boomerang ne reviennent plus rapidement que prévu dans la figure des acteurs de la formation !